samedi 27 novembre 2010

Blog à part

Confidence pour confidence, je ne sais pas si je vais continuer encore bien longtemps à venir ici parler broderie. Lassitude ? Baisse d'intérêt pour les petites croix semées sur la toile ?
Il est vrai que je me passionne beaucoup moins désormais pour les nouveaux modèles de tel ou tel créateur, pour les merveilles que certaines brodeuses continuent à réaliser.
Mais surtout, j'éprouve le besoin d'écrire des choses plus personnelles qui n'ont pas leur place dans un blog ouvert à tous. Certains échanges épistolaires sont devenus très importants pour moi et me prennent beaucoup de temps. Contrairement aux articles publiés sur un blog, je sais que mes lettres sont lues et les courriers que je reçois en réponse sont des joyaux précieux en ces temps superficiels. Le peu de commentaires publiés sur mon blog me conforte dans ma décision d'être moins présente ici.
Rassurez-vous : je viendrai encore parcimonieusement distiller quelques écrits mais ils ne seront plus exclusivement consacrés à la broderie. J'ai envie d'ouvrir ce blog à mes autres centres d'intérêt (la harpe principalement), au gré de mes fantaisies.
Je ne ferai donc plus l'annonce systématique de mes nouveaux articles sur accroforum. Je pense que les fidèles sauront trouver le chemin.

A bientôt...

Hélène croix de lune

samedi 20 novembre 2010

Destins croisés

Entre la revue Le Marquoir et mon blog, c'est le chassé-croisé permanent. Soit c'est moi qui publie avec quelques mois de décalage les textes écrits pour cette revue. Soit, c'est le Marquoir que publie mes anciennes nouvelles. Ainsi depuis le numéro 71, Le fil d'Ariane est proposé en épisodes. Voilà qui devrait ravir celles qui préfèrent lire sur du papier.

Le texte ci-dessous a été publié au printemps 2010.
Inspirée par les histoires de la comtesse de Ségur et les récits de Colette sur son enfance sauvage, je voulais raconter l'amitié de deux petites filles à travers la broderie.
J'aime beaucoup les petits rouges qui illustraient l'article.


Adèle et Blanche

ou l'apprentissage du point de croix


Chaque année, dès que venait l’été, notre grande demeure campagnarde s’animait. C’était le temps des visites mondaines qui dérangeaient mes activités de petite fille turbulente. Ma tante parisienne s’installait chez nous pour quelques mois, en compagnie de mes cousines. Le piano résonnait lors d’interminables soirées musicales où le sommeil me gagnait si souvent. Les après-midi consacrés aux travaux d’aiguille me rendaient nerveuse. Je haïssais ces heures interminables dans le boudoir étouffant de ma mère. C’était pire qu’au pensionnat.

- Adèle, votre ouvrage n’avance guère !

- C’est qu’il fait si chaud, ma mère…

- Je crois surtout que vous avez coupé une aiguillée de paresseuse…

Sans doute avait-elle raison. Mes cousines me toisaient du regard. Evidemment qu’elles brodaient mieux que quiconque. Moi, dès que je pouvais, j’allais courir dans les bois. Elles, leur seule occupation étaient de tirer l’aiguille dans un appartement surchargé de tentures. Elles brodaient en attendant celui qui les changerait de lieu de captivité. Je rêvais de liberté et une rage folle me prenait parfois.

- Adèle, à quoi pensez-vous, demandait ma mère, vous allez casser votre fil ou tordre votre aiguille.

- Ou faire un trou dans la toile, rajoutait une des mes secourables cousines.

Pourtant, je les aimais bien, les filles de ma tante. Avec leur teint de porcelaine, leurs jolies dentelles et leur façon de sourire comme si elles s’excusaient d’exister.

Marguerite était la plus âgée. Elle avait terminé cette année son grand marquoir que toute la famille se devait d’admirer comme il se doit.

- Comme les lettres sont bien formées ! Et l’arrière si soignée.

Sa sœur Juliette, d’un an sa cadette, était déjà bien douée elle aussi. Elle avait une volonté incroyable. Comme si elle voulait dépasser sa sœur et lui voler le prince charmant qui serait, à coup sûr, conquis par tant de finesse.

J’avais soif d’aventures dans les bois, de rencontres mystérieuses et sauvages. Hélas, il n’y avait aucun elfe ou lutin par ici. Pas même un garçon. Ma seule amie était Blanche, la fille de la lingère. Je la retrouvais souvent dans l’antichambre encombré de linge à empeser ou à rapiécer. Elle avait presque toujours une aiguille de fil blanc à la main car elle aimait aider sa mère. Le raccommodage était sa principale distraction. La broderie des pauvres gens… Elle prenait tant de plaisir à soigner ses reprises que j’avais honte d’avoir massacré une fois de plus, la toile sur mon tambour. Si seulement, j’avais pu lui laisser mon ouvrage en cachette. Comme elle aurait été ravie de former de belles croix avec des fils de soie ! Parfois, je lui apportais des fins d’aiguillées qu’elle collectionnait comme un trésor.

Un jour que j’étais fiévreuse et devais garder le lit, j’avais souhaité la compagnie de Blanche pour me faire passer le temps. Ma mère avait accepté. Elle estimait beaucoup mon amie qui avait des manières plus posées que les miennes. J’avais demandé à ce que Berthe, notre bonne, m’apporte mon ouvrage.

- Cela me fera du bien, ma mère, de faire quelques points en bavardant.

Ma mère avait certainement pensé que je devais être bien malade pour réclamer ma broderie. En réalité, j’avais dans l’idée de confier mon canevas à Blanche. De lui offrir le bonheur de voir la toile se couvrir de fleurs, peu à peu. Ce bonheur que je n’arrivais pas à éprouver.

Ma mère découvrit ma supercherie, et à ma grande surprise, s’en amusa.

Le lendemain, elle offrit à Blanche un tambour, de la toile à broder et un petit nécessaire rempli de fils de toutes les couleurs.

- Désormais, ma fille, Blanche aura son ouvrage et toi, le tien. Et j’espère que cela te motivera de broder avec ton amie. Regarde comme elle a mis tout son cœur pour arranger les points que tu avais si mal formés.

Et c’est vrai qu’avec Blanche, broder prit une autre saveur. Nous emmenions notre ouvrage un peu partout et faisions quelques points pour nous reposer de nos courses-poursuites dans le verger. Il m’arrivait de grimper dans le vieux cerisier et de broder assise sur une branche, en équilibre. Blanche tirait l’aiguille, le dos bien calé contre le tronc de l’arbre. La broderie était devenue un moment d’espièglerie entre deux petites filles. Nos rires se mêlaient aux chants des oiseaux. Nous semions, de ci de là, des bribes de fils qui s’envolaient au gré du vent.

Nous allions très vite devenir des femmes et la vie nous séparerait. Nous savourions, insouciantes, les dernières heures de notre enfance.

(c) Hélène croix de lune, Le marquoir, n° 69


dimanche 14 novembre 2010

Généalogie

J'ai enfin terminé le montage du quatrième abécédaire de ma série 'Grand-mère veux-tu..."

Des fils croisés maintiennent la toile bien tendue sur un carton.

Des petits noeuds cousus dans les coins, lui donnent un air coquet.

Et voilà. Il ne restait plus qu'à l'accrocher avec les autres dans l'entrée.

En bas, de gauche à droite : Maria-Louise, Suzanne, Madeleine
En haut, de gauche à droite : Victorine, Madeleine (ma fille),
une grille Sajou brodée sur tissu blanc (une de mes premières broderies).



Grand-mère, Grand-mère
Vous êtes morte cette nuit
Grand-mère, Grand-mère
Vous êtes morte d'ennui

Dans votre intérieur modèle
Entre vos nappes brodées
Vos napperons de dentelle
Vous avez capitulé
Du haut de leurs étagères
Vos confitures en pot
Vos terrines, vos tourtières
Ont enfin eu votre peau
[...]
Extrait des paroles de Grand-mère, magnifique chanson d'Anne Sylvestre

samedi 6 novembre 2010

En voiture Simone




Poupée en biscuit des années 20

Réderie de l'automne, à Amiens.
Elles étaient des centaines un peu comme ellle, vieux stock d'une usine fermée depuis longtemps. Il y en avait des grandes, des minuscules mais c'était elle la plus jolie ! Je l'ai prénommée Simone.

J'adore ses chaussettes suggérées par une ligne bleue et le noeud peint dans les cheveux.


Il y avait aussi quelques navettes d'une filature désaffectée.