samedi 26 février 2011

Bientôt le printemps...



Timidement déjà, les oiseaux chantent le retour des beaux jours...

Version monochrome d'un modèle de Danybrod que j'avais brodé en couleur en 2008. Toujours aussi plaisant à réaliser, malgré l'épreuve des coutures.
Cet oiseau s'en va faire son nid du côté de l'Alsace.

dimanche 13 février 2011

Clés d'accord

Je me suis toujours demandé pourquoi les clés servant à accorder les harpes, étaient avant tout fonctionnelles et pas très jolies. Evidemment, il vaut mieux quelque chose de pratique puisqu'il s'agit tout de même d'accorder entre 30 à 48 cordes !
Ma précédente clé était en bois vernis.

Ma nouvelle est en métal entouré de caoutchouc noir, ce qui protège l'instrument en cas de chute de la clé pendant l'accordage.

Il en existe aussi des bleues, des roses, des jaunes...

Voici la clé du fabriquant CAMAC. Sa forme est bien étudiée mais le bois brut fait un peu mal aux mains.

Il faut voyager pour trouver un peu plus de fantaisie ! Voici une clé d'accord mexicaine en forme de colibri, conservée au musée du Quai Branly, à Paris.

Et voici la clé qui figure dans l'article Lutherie de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert. Je la trouve très raffinée.

Mais mon coup de coeur revient à la clé de l'atelier Harpediem, créée par le luthier Jean-Luc Vaillant dont j'ai découvert le travail sur internet. Elle est superbe tout comme les harpes de cet artiste de talent.


Tiens, et si je commençais une collection ?

dimanche 6 février 2011

Harpe et mots doux dans les Liaisons dangereuses


Autour de 1780, la harpe connut un de ses âges d'or. Marie-Françoise Thiernesse souligne dans sa thèse (La harpe à Paris au 18e siècle), combien elle est alors l'instrument à la mode. Nombreuses sont les aristocrates et les bourgeoises qui s'y adonnent ; Paris comptait trente quatre professeurs de harpe vers 1779, cinquante huit en 1784. Le célèbre concerto pour flûte et harpe de Mozart, composé en 1778, la qualité de harpistes telles que Marie-Antoinette et Madame Récamier ne sont sans doute pas étrangers au prestige acquis par un instrument béni par le progrès technique du Siècle des Lumières.

En 1782, alors que Cousineau "inventait" la harpe à pédales, parut l'oeuvre de Pierre-Amboise Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses. Sous la forme d'un roman épistolaire, l'auteur brosse sans complaisance le portrait d'une époque.

La harpe n'est pas qu'un simple élément du décor ; elle joue un rôle essentiel dans la relation qu'entretient la jeune Cécile Volanges, ancienne ursuline découvrant le monde, avec son professeur de harpe, le chevalier Danceny. Elle devient le secret intermédiaire d'un échange de lettres entre le maître de musique et son élève. Dans la lettre XVI, Mademoiselle Volanges décrit le stratagème mis au point par le chevalier :
" Après que nous eûmes fini de chanter, il alla renfermer ma harpe dans son étui ; et en m'en rapportant la clef, il me pria d'en jouer encore le soir, aussitôt que je serai seule. Je ne me défiais de rien du tout ; je ne voulais même pas : mais il m'en pria tant, que je lui dit que oui. Il avait bien ses raisons. Effectivement quand je fus retirée chez moi et que ma femme de chambre fut sortie, j'allais pour prendre ma harpe. Je trouvai dans les cordes, une lettre, pliée seulement, et point cachetée et qui était de lui."

Cécile utilisera la même ruse pour répondre à son amoureux (lettre XVIII). La harpe continue ensuite à faire office de boîte aux lettres. Ainsi détournée de sa destination première, elle devient l'objet non plus d'un jeu musical mais d'un jeu d'écriture. La hâte de se mettre à l'instrument cache alors la véritable impatience, la découverte d'une autre harmonie, celle qui se dégage de la douce sonorité des mots d'amour :
"Je demanderai à jouer de la harpe aussitôt que vous serez arrivé, afin que vous ayez ma lettre tout de suite."(lettre XXX).

Choderlos de Laclos a peut-être attribué une valeur symbolique à la harpe dans les Liaisons dangereuses. Il est toutefois malaisé d'en interpréter le sens tant la symbolique de l'instrument est complexe et souvent contradictoire. La harpe des anges distille une musique paradisiaque toute empreinte de pureté ; celle des sirènes n'est qu'envoûtement et diabolique séduction.
La harpe de Cécile de Volanges sert à la fois d'écrin à d'innocents billets doux et d'intercesseur aux préludes des jeux de l'amour :
"
En posant ma harpe vis à vis de moi, il se plaça de façon que Maman ne pouvait voir, et il prit ma main qu'il serra...mais d'une façon !" (lettre XVIII).
Médiatrice d'une passion naissante, n'en constitue-t-elle pas la métaphore, expression de la candeur et du charme, de l'ingénuité et de la séduction, interprète de la douceur et des dangers de l'amour ?

Certaines oeuvres picturales de l'époque illustrent merveilleusement ces heures galantes où se tissent des liaisons amoureuses... et peut-être dangereuses.

Jacques Sablet, scène de la vie romaine (la joueuse de harpe)
-vers 1787 -
Lausanne, musée cantonal d es Beaux-arts