vendredi 25 décembre 2015

Une maison de poupées, Rumer Godden


 
J'ai toujours aimé la littérature "Jeunesse" et suis encore capable aujourd'hui de relire Heidi ! Un ami connaissant mon goût pour les maisons de poupées m'a prêté ce roman de Rumer Godden (1947), traduit de l'anglais par Sherban Sidery et illustré par Kersti Chaplet.

Non seulement, c'est l'histoire d'une vieille maison de poupées et de ses habitants (principalement Tottie, une poupée en bois) que deux petites filles, Charlotte et Emilie, redécouvrent en 1946. Mais il est aussi question d'un "sampler", traduit par "échantillon". J'ai trouvé la description de ce vieux marquoir très intéressante pour nous brodeuses et je la retranscris ici.
 
Tottie et la maison de poupée n'étaient pas les seules choses dans la demeure qui aient appartenu à l'arrière grand-mère et l'arrière-arrière-grand-tante de Charlotte et d'Emily. Il y avait en outre, un échantillon brodé.
Qu'est-ce qu'un échantillon ? demanda Pomme.
C'est une broderie à l'aiguille que l'on accroche au mur, lui expliqua Tottie, c'est un travail au point de croix sur un canevas très fin, et parfois, la plupart du temps, ces points sont très fins eux aussi. Te souviens-tu du "tailleur de Gloucester" ? demanda Tottie : on dit que "les points sont si petits, qu'ils ne sauraient avoir été brodés que par une souris". Voilà mais les points de l'échantillon, qui sont pareils, n'ont pas été brodés par une souris, dit Tottie, ce sont deux petites filles qui les ont brodés : il y a là des heures et des heures de travail. Il y a des lettres, des alphabets, toute une calligraphie. Je me souviens parfaitement, dit Tottie. Je suis bien contente que maintenant les petites filles ne fassent plus ce genre de travail, ajouta Tottie.
L'échantillon de l'arrière grand-mère était accroché dans la chambre des enfants. Il était rectangulaire et bordé d'une mince baguette de bois. La broderie représentait des gerbes de fleurs sur fond crème, et en dessous, brodés aussi, des vers qui, en petits points bleu ciel, disaient :

Bienheureuse suis-je d'avoir brodé ces gerbes,
Odeur du temps passé quand je jouais dans l'herbe
Par douce pluie ou jour que le soleil allume,
Aimant la fleur, le fruit, et le poil, et la plume,
Contente d'avoir subi la volonté de Dieu,
Pour aborder sans peine aux rives des adieux.

Charlotte n'aimait pas regarder l'échantillon, elle prétendait que cela lui donnait mal à la tête et puis elle ne comprenait pas du tout le poème, mais Emily l'aimait.

 Curieux poème qui mériterait sans doute d'être lu dans la langue originale, je pense ! 

En faisant des recherches sur cet ouvrage, je suis tombée par hasard sur l'histoire d'une autre poupée en bois, Hitty, inventée par Rachel Field en 1929, très bien documentée sur le blog Nain de jardin.

Une illustration de Dorothy P. Lathrop montre également une Hitty devant un sampler brodé... Drôle de coïncidence non ? 
Rumer Godden s'est peut-être inspiré de ce roman que j'ai bien envie de lire, même s'il est en anglais.

jeudi 24 décembre 2015

Et incarnatus est


D'après un modèle de Fanci That paru en 1999 dans un numéro de Just CrossStich Christmas Ornements, j'ai brodé un enfant Jésus et je l'ai monté en petit coussinet à accrocher au sapin ou à placer dans une crèche.
Posé à même le bois de la mangeoire, il sommeille sur un lit de paille, délicatement emmailloté dans un linge blanc. 

Le temps d'un modèle, l'impression de retomber en enfance et de jouer à la poupée ! Réminiscence aussi des bébés Jésus en sucre ou des fèves qui ne ressemblaient pas à des personnages Disney.
Bref, le Jésus de la crèche, c'est un peu ma culture de Noël...

De joyeuses fêtes à tous... en oubliant pas de garder un regard émerveillé et gourmand sur la vie.


dimanche 20 décembre 2015

Stop !

Tous les ans c'est pareil à cette période de l'année... Je voudrais encore faire un petite broderie pour une amie, trouver un dernier cadeau, acheter des cartes à poster pour Noël (comme le font les anglais) et quand arrivent les fêtes, je suis épuisée.
Pour garder intact mon plaisir d'offrir et d'écrire, j'ai décidé de ne gâter qu'une partie de mes amis, parents. Pour les autres, je me rattraperai l'année prochaine ou à une autre occasion. Certains devront se contenter d'une message électronique, moins artistique certes, mais tout aussi sincère.

Voilà le dernier cadeau que j'ai brodé pour Marie-Christine, ma dernière copine d'internet.
C'est un modèle gratuit de Danybrod monté en pinkeep, avec plein de rubans, des épingles et des grelots. J'adore cette artiste et j'aimerais bien un jour faire une grande broderie avec plein de ses modèles.
Marie-Christine m'a offert une carte avec une lyre brodée au fil doré que je garde précieusement et que vous pouvez admirer sur son blog

J'ai aussi rajouté dans mon enveloppe, ce garde-fils de l'Atelier des Elfes en forme d'échevette. J'aime bien ces échanges entre initiées !

vendredi 18 décembre 2015

Esprit Chalet

Modèle de Perrette Samouiloff, La montagne au point de croix
Pochette aux cerfs monté en petit coussin à suspendre, agrémenté de rubans qui maintiennent des grelots.
Un son qui rappelle les alpages... ou les rennes du père Noël. Même si les edelweiss évoquent plutôt le printemps !
J'avais envie d'offrir cet ensemble à ma belle-sœur qui a décoré toute une pièce de sa maison façon chalet. Un endroit très chaleureux et cosy.
 Et pour l'anecdote, les clochettes sont aussi un clin d'oeil à notre enfance. Quand nous nous déguisions avec mon frère et ma sœur pour jouer au théâtre, systématiquement, ils donnaient à leur cadette, le rôle de la soubrette. Et parfois, pris dans leurs rêves de chevaliers, ils oubliaient d'agiter la cloche pour me faire apparaître avec un petit plateau de dinette. 
Je prenais mon rôle très au sérieux et j'attendais, j'attendais... mais de temps en temps, je venais frapper à la porte : "C'est quand que je dois venir ?".
C'est dur d'être la petite dernière ! 


dimanche 29 novembre 2015

Pause Noël...


Dans une mauvaise lumière de novembre, voici où en est la face B de ma housse de harpe.  Le deux-tiers du marquoir de "Reflets de soie" sont brodés. 
Pour répondre à Marie-Christine qui me posait la question, j'utilise le plus souvent les fils DMC. Surtout pour les grands ouvrages qui risquent d'être lavés. 
  Je vais ranger mon ouvrage jusqu'en janvier car le temps des préparatifs de Noël est arrivé. Et j'ai très envie de broder des petits cadeaux secrets pour mes amies. Chut !!!!


samedi 21 novembre 2015

Un jour viendra...


Plaine d'Alsace depuis le mont Sainte-Odile
Au milieu de ces sites grandioses, la pensée s'élève avec plus de force, communie avec plus d'intensité avec l'au-delà supérieur, car Dieu est partout où la nature parle au cœur de l'homme. Lorsqu'un frisson passe sur les masses de verdure et fait onduler la cime des grands arbres de la forêt, lorsque la voix des torrents et des cascades monte du fond des vallées, l'âme initiée comprend mieux la beauté éternelle, la suprême harmonie des choses et vibre à l'unisson de la vie universelle. C'est ce que j'ai ressenti non seulement sur les hauteurs de Sainte-Odile, mais aussi sur la plupart des sommets des Vosges et notamment sur le Hohneck, d'où le regard embrasse toute la plaine jusqu'au Rhin, jusqu'aux Alpes lointaines.
Un jour viendra où les hommes, faisant abstraction des vieilles formes religieuses, s'uniront dans une pensée commune d'adoration et d'amour. Comme au temps des Druides, la nature redeviendra le temple auguste, ce sera alors la religion de l'Esprit, conscient de lui-même et de sa destinée, qui est d'évoluer de vies en vies, de mondes en mondes vers le foyer éternel de toute lumière, de toute sagesse, de toute vérité. Et ainsi l'unité religieuse de la terre et de l'espace, de deux humanités, visible et invisible sera fondée.

Léon Denis

mercredi 11 novembre 2015

L'aiguille patriotique

Composition française de Jeanne Legland

Que de trésors à découvrir dans les archives ! La preuve...

Examen des Bourses Lycées et collèges Filles, session du 19 avril 1917
 (AD Somme ; 99 T 396537)



Sujet : On a dit que l'aiguille à coudre est la meilleure amie des jeunes filles. Essayez de le démontrer. Exposez ensuite comment grâce à leur aiguille des jeunes filles de votre âge peuvent contribuer à la défense de la Patrie en temps de guerre.

Développement

L'aiguille est en effet la meilleure amie des jeunes filles. Elle leur rend beaucoup de services et leur fait passer d'agréables moments.
A ses heures libres, la jeune fille peut à l'aide de cette aiguille se confectionner de petites choses telles que : faire un corsage, arranger une robe, broder un col, un chemin de table, une nappe ou des draps. Elle peut même faire son trousseau.
L'aiguille distrait aussi la jeune fille, si l'ennui s'empare d'elle, elle prend sa petite aiguille, se met à l'ouvrage et le temps passe très vite.
Si par hasard, elle fait une déchirure à un de ses vêtements, elle a peur que sa maman la punisse. Ainsi, que faire pour éviter la réprimande ? Heureusement que l'aiguille est là, et qu'elle lui vient en aide, elle recoud la déchirure et il n'y paraît plus.
Si elle donne comme souvenir à une de ses amies un ouvrage à la main fait par elle-même, elle fera plaisir à son amie mais c'est encore grâce à l'aiguille. Elles font aussi les habits de leurs poupées.
Avec leur aiguille, des jeunes filles de mon âge peuvent contribuer à la défense patriotique en temps de guerre. Elles cousent de petites robes et petits tabliers pour les enfants de ces braves soldats qui versent leur sang pour empêcher l'ennemi d'arriver jusqu'à nous. Elles feront un grand plaisir aux parents de ces petits et paieront en même temps une petite partie de leurs dettes parce qu'elles doivent une grande reconnaissance vers ces enfants privés des caresses et des tendresses de leur père.
Elles cousent aussi pour les petits pauvres. Ils en ont bien besoin, car en ce moment, leur papa se bat et c'était lui leur unique soutien. Aussi, ils auront des vêtements bien chauds qui les protégeront du froid et de la pluie.
Les jeunes filles confectionnent des chemises qu'elles envoient aux soldats qui ont leur famille restée en pays envahis et qui sont sans ressources, aux blessés qui sont dans les hôpitaux, et principalement aux malheureux prisonniers, réfugiés en pays ennemi et privés eux-aussi de leur famille Ils seront contents d'avoir ces vêtements, il leur semblera recevoir une petite partie de chez eux, un souvenir de leur pays natal, nous leur prouverons par là que nous les aimons et que nous pensons à eux.
Nous voyons par ces exemples que l'aiguille est très utile à la jeune fille et qu'elle peut procurer un peu de joie à ceux qui sont éloignés des êtres qu'ils aiment.


Une autre façon de se remémorer la Grande Guerre en ce 11 novembre 2015.

mardi 3 novembre 2015

Méditons

La méditation est un sujet à la mode (un peu trop peut-être ?) mais cela m'a donné envie de vous parler de mon expérience.

J'ai eu une première approche de la méditation zen vers 17 ans, en compagnie de mon professeur de harpe, Régis Chenut. C'était une initiation à la pratique du za-zen : il fallait rester un heure en tailleur sur un zafou (coussin de méditation) en essayant de rester le dos droit. A la fin, mon dos est comme un bout de bois. C'était un peu extrême mais cela m'a marqué.

Ensuite, j'ai une ancienne collègue qui a tout quitté pour fonder une sangha bouddhiste à Strasbourg. Elle m'avait fait connaître les livres de Thich Nhat Hanh sur la méditation pleine conscience et quand j'ai été malade m'a orienté vers des pratiques plus médicales de la méditation (Jon Kabat-Zinn, Christophe André) ou en tout cas moins religieuses (Fabrice Midal). 

J'ai décidé de pratiquer en groupe l'an passé mais je n'ai pas aimé : la prof  nous faisait parler de notre expérience à la fin un peu comme dans un cours de sophrologie.

Quand je médite, j'essaie de m'installer sur mon coussin, les talons en arrière et non en tailleur car cela ne me convient pas. C'est une façon de me poser, de reprendre conscience du moment présent. Je me concentre sur ma respiration, sans la modifier et si cela m'angoisse trop, sur mes pieds ou une autre partie du mon corps. Je ne cherche ni à me détendre, ni à analyser ce qui se passe. Je laisse faire. C'est une sorte de lâcher prise, indispensable pour moi qui suis habituée à  tout contrôler. J'aime bien aussi écouter les bruits dehors ; les oiseaux qui chantent et même les voitures qui passent (mais je n'arrive pas encore avec la perceuse du voisin). Je peux aussi répéter un mantra ou répéter une sorte de prière. Il existe des méditations pour développer notre compassion, d'abord envers nous-mêmes, ensuite envers les autres. A partir de là, méditer et prier se confondent un peu pour moi.

Méditer n'est pas toujours agréable. C'est un peu comme accorder un instrument : pas passionnant mais nécessaire. Parfois, quand j'ai fini, je peux être plus agitée qu'avant. Parfois, durant la pratique, j'ai un moment de panique surtout quand je suis agitée en m'installant. L'immobilité, le "rien faire" me déstabilise. Des fois aussi, cela m'ennuie !!!

Les gens croient souvent qu'il faut s'interdire de penser quand on médite. Or c'est impossible ! On ne peut pas arrêter le flux de ses pensées mais en méditation, on apprend à les observer, sans les juger. On accueille ce qui vient. Et on prend les pensées pour ce qu'elles sont : des pensées ! Dès que le mental s'évade, on en prend conscience et on revient aux sensations (la fraîcheur du petit matin sur la peau, la cloche de l'église qui sonne, l'épaule qui tire, etc....).
Quand on pratique 20 minutes, c'est bien car c'est après 10 minutes que des choses souvent se passent. Le cerveau semble à ce moment là se déconnecter de ses automatismes. 

L'idéal serait de pratiquer tous les jours. Et de pratiquer aussi de manière informelle dans la journée : faire de temps en temps une chose en pleine conscience (préparer son thé, manger, respirer, écouter l'autre....).

On me  pose souvent la question : à quoi sert la méditation ? A partir du moment où on cherche un but, une utilité à la pratique (être moins stressée, plus zen), on fait fausse route, on est plus dans la justesse. C'est ce que nous, les occidentaux, avons le plus de mal à comprendre. Toutes nos activités doivent toujours être rentables.

Il m'arrive aussi de faire des méditations guidées par un CD. J'aime bien la voix de Fabrice Midal.

Parfois aussi, nous pratiquons la méditation sans le savoir !

Et parfois aussi, il m'arrive de ne plus pratiquer sous prétexte que la posture me fait trop mal au genou.

Bref, méditer est loin d'être une activité facile et j'admire ceux qui ont de la constance dans leur pratique. Qui se lèvent tôt pour passer un moment sur leur coussin de méditation.

J'en suis encore bien loin !

dimanche 1 novembre 2015

Barbotines mortuaires

Que seraient les sépultures de nos défunts sans ces vieilles barbotines que j'aime tant ?
Couronnes du souvenir jamais effacé,
Aux couleurs éclatantes préservées malgré les cassures du temps...


Elles se mêlent à la fonte et à la pierre des cimetières en une sorte d'éternité cristallisée.
Me promenant dans les allées d'un petit cimetière de la Meuse, j'ai été émerveillée par la variété des compositions.
Je vous invite vous aussi en ce week-end de la Toussaint, à repérer ces belles décorations mortuaires, entre deux chrysanthèmes !
 Aujourd'hui, les entreprises de pompes funèbres, proposent davantage des plaques sinistres en granit. Dommage... Pourquoi les cimetières sont-ils devenus ces étendus grises et sans âme ?
A méditer...


jeudi 15 octobre 2015

Vaisselle nomade

Elle a traversé les années et vu du pays... et puis la poste d'aujourd'hui lui a fait des misères. Joëlle voulait m'envoyer cette vaisselle car elle sentait qu'elle me revenait. A cause des  hasards et des coïncidences. Sa jeune voisine qui la lui avait donnée l'avait hérité d'une personne qui s'appelait Madeleine comme ma fille... Et Joëlle pensait que c'était de la vaisselle qui était alsacienne comme moi. En fait, Sarreguemines est en Lorraine mais tout va bien, j'ai aussi des attaches dans cette belle région !
Comment ce service a t-il abouti dans les Hautes-Pyrénées ?
Lors de la dernière guerre, une bonne partie des habitants du nord-est ont été déportés là-bas et certains d'entre eux ensuite sont restés dans la région....

Ce que j'ai pu sauver me servira de cache pot dans mon jardin.

Dommage pour la belle saucière !
Tel devait être le destin de cette vaisselle.

Je ne sais pas si je suis influencée par son histoire mais je lui trouve un air patriotique avec ses fleurs bleues, blancs, rouges !

samedi 10 octobre 2015

So British !

  J'essaie de moins craquer quand je flâne à la grande rèderie d'Amiens. A quoi bon entasser toutes ces vieilleries du passé chez moi ? Mais à chaque fois, je rencontre un objet qui me fait baisser les armes.
Quand j'ai vu ces jolies fleurs roses, je me suis tout de suite dit qu'elles auraient leur place dans mon oratoire à la Vierge. J'hésite un peu depuis que je sais que ce sont une salière et une poivrière !
Production anglaise : Denton China England.
 Il n'y a que les anglais pour faire ça, non ? J'adore, évidemment !

dimanche 13 septembre 2015

Plumes d'anges

Celui qui trouve une plume, reçoit des ailes *


J'aime découvrir des plumes dans la campagne ou sur les trottoirs urbains. J'essaie de ne pas les ramasser pour ne pas interrompre leur voyage mais j'ai du mal à résister à certains spécimens.
Comme celui-ci, trouvé quelques instants après avoir assisté à l'envol d'un rapace dans une forêt de Bourgogne. On aurait dit un aigle blanc. J'ignore si cette plume était un cadeau qui m'était destiné mais je la garde précieusement comme un trésor...
 Ou ce petit duvet lové dans une feuille d'automne ramassée dans ma cour. Rencontre magnifique imaginée par le vent.

Je vous invite aussi à découvrir d'autres plumes d'anges sur un blog qui m'inspire et semble parfois dialoguer avec mon âme. 
On dirait que les plumes s'envolent et atterrissent toujours au bon endroit ! Sans doute la magie des anges...

(* article "Plume enchanteresse" de la revue Happinez)

dimanche 16 août 2015

Histoire de crapauds

Il a fait chaud cet été, très chaud. Trop chaud pour moi en tout cas ! Un après-midi dans le village où j'aime passer mes vacances, les bœufs hurlaient littéralement sous le soleil.
  Et soudain, en allant me rafraîchir, voilà ce que j'ai découvert dans les escaliers menant à la cave :
J'ai d'abord cru à une feuille de marronnier, en avance sur l'automne. Mais c'était bien un crapaud ! Il avait l'air à moitié mort, ne bougeait plus, à la recherche d'un peu de fraîcheur. Non avec une certaine répugnance, je l'ai observé. Et j'ai fini par le trouver attachant et à me faire du souci pour lui. Avait-il besoin d'eau ? Etait-il incapable de regagner la forêt ?
Je passai les heures chaudes de cet après-midi là à me rendre régulièrement au chevet de ce pauvre crapaud, rassurée quand je le voyais cligner un œil. Je l'ai aspergé d'eau mais il restait sans réaction aucune... A la tombée de la nuit, il a enfin disparu sans me dire au revoir, ne laissant comme souvenir de son passage que quelques crottes !
Si je n'avais pas été une citadine, j'aurais su que dormir le jour dans un coin frais est une activité normale de crapaud. En voulant aider ce gros paresseux, je l'avais sans doute dérangé. Combien de fois par méconnaissance, faisons-nous de telles maladresses ?

Plongée dans mes pensées de fin de journée, je me remémorai les légendes d’autrefois où des belles embrassaient des crapauds qui se métamorphosaient en prince charmant. Personnellement, même si je commençais à le trouver mignon, j'aurais bien été incapable de le faire !
Je me souvenais aussi d'un livre illustré de mon enfance. Un conte de Perrault où, sous l'effet de sortilèges, une fille méchante crachait des serpents et des crapauds alors que sa douce sœur, elle, déversait à chacune de ses paroles, des fleurs et des pierres précieuses.
 Combien de fois avais-je répandu autour de moi des crapauds plutôt que des fleurs en ne prononçant pas des paroles d'amour ?
Je revoyais enfin le tentateur des vierges folles de la cathédrale de Strasbourg dont le dos grouille d'amphibiens, lézards, serpents. Combien de fois avais-je caché mes véritables intentions derrière des airs innocents ?

De retour chez moi, je suis reconnaissante à cet innocent animal devenu malgré luis symbole du mal, de m'avoir inspiré ces réflexions durant ma retraite estivale. J'espère qu'il n'a pas fini écrasé et desséché sur une route meurtrière, victime de nos machines cruelles mais coule des jours paisibles à l'ombre d'une source sacrée de Bourgogne.
 
Clin d'oeil du hasard (?), j'ai enfin trouvé le petit fauteuil dont je rêvais depuis longtemps pour lire, broder, jouer de la harpe et que l'on nomme...
 
CRAPAUD !


samedi 1 août 2015

Il faut vieillir

Va-t'en parée, va-t'en douce, et ne t'arrête pas le long de la route irrésistible, tu l'essaierais en vain - puisqu'il faut vieillir !

Colette (Les vrilles de la vigne)


En descendant la rue pentue d'un village de Bourgogne, j'ai fait la rencontre incongrue d'un harmonium qui prenait le frais très tôt sur le perron d'une demeure abandonnée. Il était là sans doute depuis des années et ses couleurs commençaient joliment à s'estomper me rappelant que le temps qui passe peut être une douce fée qui magnifie le monde de sa baguette magique.

Je me suis alors souvenue que mon père fêtait ses quatre vingts ans dans quelques jours et tout en remontant le village, je pensais que ce vieil harmonium était un bien curieux pense-bête de toutes les touches blanches et noires qui avaient jalonnées sa vie de musique...

 Celles du piano du petit séminaire de Walbourg qui lui avaient donné l'audace d'échapper à la voie que ses parents avaient tracée pour lui. 
Celles des orgues grandioses qu'il jouait parfois pendant la messe, si près du ciel. J'avais l'autorisation de l'accompagner sur la tribune à condition d'être sage. Réfugiée dans quelque recoin sombre, j'essayais de résister au son qui s'échappait des tuyaux et me coupait le souffle. J'aimais regarder ses pieds danser en rythme sur les grosses pédales en bois, étranges et subtiles percutions... 

Et puis tant et tant d'autres claviers, encore ! Celui un peu usé de notre Gaveau qui ne sonne plus très juste, mais qu'importe. Celui du synthétiseur électrique qui faisait des syncopes à notre mariage provençal, perturbé par un orage.
Sans oublier les claviers imaginaires sur lesquels d'un pianotement discret, mon père inventait des mélodies pour faire chanter les enfants d'Alsace.



Rien n'est plus beau qu'une main qui se souvient des musiques d'autrefois et en chantonne de nouvelles, du bout des doigts, dans un doux murmure silencieux...



Heureux anniversaire, mon cher papa !