vendredi 29 août 2008

Sur les traces d’Annette Flory

Cet été, montant la rue qui mène à la basilique Sainte-Madeleine de Vézelay, je me suis arrêtée dans la boutique d’un brocanteur. Beaucoup de draps blancs, une boîte à couture sans intérêt contenant un petit abécédaire tout délavé et dans la pièce du fond, une dizaine de chemises brodées d’un monogramme rouge. Les chemises étaient abordables, alors je me suis laissée tenter. Mais laquelle choisir ? Une première série portait le monogramme AR assez mal brodé, une seconde, un très joli monogramme MG. J’ai donc choisi ma chemise parmi la seconde série.

Comme j’aime connaître l’histoire des objets (ou à défaut les inventer), j’ai interrogé la dame de la boutique. Elle m’a dit que l’ensemble provenait d’une même armoire. Je ne sais pas pourquoi, j’ai alors également acheté le tout petit marquoir, pourtant bien miteux. Une impulsion qui ne m’a coûté que 5 euros, heureusement. Mon mari était un peu perplexe mais n’a pas cherché à comprendre !
De retour chez moi, je me suis amusée à essayer la chemise. Fabriquée à la machine, elle m’impressionne par sa largeur et son poids.

Je me demande si on portait d’autres vêtements par dessus et si on pouvait vraiment bouger avec une telle armure sur le dos. Le lin est serré (peut-être est-ce du chanvre plutôt que du lin) et difficile à broder car on arrive guère à voir la trame. Le monogramme AG est malgré tout parfaitement brodé, à l’endroit comme à l’envers.


Certains trousseaux étaient-ils brodés par des professionnels ? L’autre monogramme AR avait l’air tellement plus artisanal (d’ailleurs, j’aurais aussi dû acheter une chemise de cette série-là).

Le marquoir est brodé sur le même tissu très serré et la petite Annette Flory, a eu bien du mal à former ses lettres. Annette ! Je suis presque sûr que les chemises monogrammées AR étaient les siennes (d’ailleurs, elle n’avait guère fait de progrès en broderie !!!). Pourquoi y a-t-il un R et non un F en deuxième position ? Etait-ce son nom de femme mariée ? J’avoue ne pas trop connaître les us et coutumes des trousseaux de jadis. Quant à savoir qui était MG par rapport à AR... Les blouses semblaient dans le même état de conservation.

Modeste et émouvant marquoir que celui d’Annette. J’ai eu du mal à déchiffrer le nom de Flory mais je ne pense pas m’être trompée. Le temps, étrangement, a effacé le nom et préservé l’alphabet. De taille modeste (16 X 11 cm), il ressemble un peu à un marquoir anglais, structuré par des lignes (mais l’absence du W, atteste cependant une provenance française). Pas de croix de Dieu mais une croix termine l'alphabet et une autre sépare le prénom du nom. Les lettres sont hésitantes, les croix mal formées et pas toujours dans le même sens, l’arrière comporte des noeuds. Plié dans une boîte à ouvrage de fortune remplie de fils perlés, il a cependant été conservé comme quelque chose de précieux. Jusqu’à atterrir chez un brocanteur, où, heureusement, je passais par là. Mais cela aurait aussi pu être l’une d’entre vous…

Par curiosité, j'ai tapé le nom d'Annette Flory dans Google et j'ai trouvé une américaine née en 1869 à Decatur dans l'Iowa qui portait le même nom. Etonnant, non ?

Si quelqu'un connait un ouvrage un peu sérieux sur les trousseaux de jadis, je suis preneuse.


8 commentaires:

Anonyme a dit…

Coucou toi, la vilaine coquine qui est passée tout près de chez moi et qui ne s'est pas arrêtée....
Souvent les initiales sur les broderies étaient d'abord celle du nom du mari puis celle du nom de jeune fille de son épousée...
Tu as eu tout à fait raison d'acheter ce petit marquoir même si un peu délavé car il fait un ensemble avec cette bien jolie chemise qui doit être une chemise pour la nuit, à moins que ce soit une sous chemise d'homme quoique pour moi elle soit trop féminine.
Un délicieux article.
Les macarons t'attendent!!!!

Hélène a dit…

Les nuits devaient être terriblement amidonnées, Sylvie !!!

Anonyme a dit…

Bien que je n'ai jamais rien lu qui le confirme, je suis comme toi quasi persuadée que certains trousseaux étaient brodés par des professionnelles. Malheureusement, je n'ai pas connu assez longtemps ma grand-mère pour lui poser la question. Adolescente, on a bien d'autres sujets en tête... Je sais pourtant qu'elle que c'était son métier...
Merci Hélène de nous faire partager tes fabuleuses trouvailles !

Je t'embrasse,

L.S

Cath a dit…

Rêves de Blanc de Françoise de Bonneville - Editions Flammarion et Les Trousseaux du temps jadis d'Olga Verschoor - Editions Hatier

mon 1er message n'étant pas passé ... je recommence ...
je disais donc que oui il y avait des brodeuses professionnelles (beaucoup même) pour la grande bourgeoisie et pour les chatelaines ... et il y en a encore aujourd'hui (beaucoup moins) et elles travaillent plus pour les ateliers de Haute Couture mais aussi pour des maisons comme Noël, Malbranche ...

Coco a dit…

Je me suis régalée à lire le livre de Brigitte Franche : Marquoirs et trousseaux en Bourgogne. Je te le conseille vivement : http://www.amazon.fr/Marquoirs-trousseaux-Bourgogne-l%C3%A9ducation-filles/dp/2844790437

Anonyme a dit…

Je suis venue ouvrir ta porte grâce au "Chat bleu" et quelle agréable visite et lecture!!!je reviendrai
Michelle

Anonyme a dit…

j'habite en Berry ou les chemises étaient presque pareilles iln'y avait pas de pate de boutonnage mais une coulisse.Ce sont des chemises de jour et ...de nuit !portées sous les vetements ,au 18 e sous un jupon, une jupe et un caraco.sans doute portées dans les campagne jusqu'en 1950 par des dames agées ;je fais partie d'un groupe d'art et tradition populaire et j'en porte à l'occasion c'est très confortable,meme si le chanvre est neuf.Les monogrammes sur une chemise étaient les initiales de jeune fille brodés par elle avant son mariage.à bientot Isa

e

Anonyme a dit…

Pour complèter les réponses sur les brodeuses pro, il faut aussi savoir que certains trousseaux étaient brodées par les jeunes filles des maisons de correction notament les Bon Pasteur. Ces filles n'avaient pas le choix de le faire ou non puisque les travaux ainsi réalisés étaient une source de revenus pour les religieuses et pour elles c'étaient leur rééducation.
J'en ai quelques réalisations soigneusement conservées et qui me sont prètées pour mon travail de recherche historique sur cette rééducation...