mardi 22 janvier 2013

La renarde, Mary Webb


Hasard ou pas, j'ai acheté ce roman anglais qui semblait avoir été écrit pour moi : harpe et féerie y sont à l'honneur. Quelle émotion de découvrir une auteure que je ne connaissais pas encore, un univers personnel et original. Cela change des romans nombrilistes à la mode !
Ecrit en 1917, La Renarde est le deuxième roman de Mary Webb, un conte romantique et puissant dont l'intrigue se situe au coeur d'une nature mystérieuse. Hazel Woodus, jeune fille sauvage de dix-huit ans, vit avec son père dans la campagne anglaise. Il est harpiste, apiculteur et fabricant de couronnes mortuaires. Sa mère, bohémienne du Pays de Galles, est morte quand elle avait 14 ans, lui laissant un vieux manuscrit qui traite des charmes et sortilèges.
Amoureuse de la nature, elle aime vagabonder dans les bois en compagnie de sa renarde apprivoisée. Mais les bois, comme les terres environnantes, appartiennent à Jack Reddin, chasseur passionné. Les chemins de Hazel et Jack se croiseront donc, sans doute pour le pire. A moins que le révérend Marston, qui épouse Hazel, ne réussisse à éloigner la jeune femme de cette contrée...
J'ai adoré les personnages de cette histoire. Hazel, sorte de Fifi Brindacier perdue dans le monde des humains. Son père Abel, homme des bois solitaire.

Jamais Abel n’était plus heureux qu’aux moments où, assis comme un barde devant des ruches écumantes d’activité, il tirait de sa harpe, des sons qu’accompagnait le grondement voilé du labeur en train dans les rayons. Ses moyens d’existence étaient autant de joie pour cet homme. Il possédait le secret du bonheur en ce qu’il pouvait gagner de quoi se suffire en faisait ce qu’il aimait, il jouait de la harpe aux concours agricoles, aux bals de village, aux fêtes religieuses, aux mariages. Il vendait son miel et quelquefois ses abeilles. Il prenait plaisir à tresser des couronnes mortuaires, à jardiner, à menuiser, et toujours il avait à son horizon sa musique – un air nouveau à essayer sur sa harpe dorée, un arpège à combiner, une difficulté de virtuose à vaincre.

Tiraillée entre deux amours, entre la pureté ou la volupté, Hazel  se sert d'un sortilège de sa mère pour savoir quelle décision choisir : rester avec le révérend qui l'aime comme une icône ou retrouver les étreintes charnelles de Jack....

Muse en dalmatique jouant de la harpe, Ernest Hebert
Sa mère disait qu’avant une entreprise importante, il fallait interroger les harpistes. Le livre expliquait comment. On se rendait sur une colline solitaire et là, les yeux fermés, on écoutait. Si l’entreprise était bonne, un son de harpe vous parvenait de très loin, car, au sommet d’une colline violette, invisible aux humains, de petites créatures d’argent jouaient sur des harpes d’or. Elles jouaient du lever au coucher de la lune. Et quand le soleil montait, elles pleuraient de pitié pour ceux qui ne les avaient pas entendues. Si on les entendait, aussi faiblement que ce fût, c’était bon présage : on mènerait l’entreprise jusqu’au bout et sans larmes. Mais il fallait attendre patiemment et ne parler de rien à personne.  [...]
 Elle reprenait le chemin du presbytère quand une note de musique égarée, semblait-il, dans l’espace, résonna à son oreille. Puis, quelques notes encore, ténues, argentines, aspergèrent, en quelque sorte, le silence. L’air se perdait au loin, mais ces sons étaient sans aucun doute, des sons de harpe.
 -          Les fées ! murmura Hazel. Faudra que j’y aille !  [...] 
 Elle ne sut jamais que le harpiste n’était autre que son père qui revenait chez lui, après une des nombreuses assemblées où il se rendait en été, et qui s’accordait de fréquents repos, en raison de la bonne bière qu’il avait bue. Pauvre Hazel ! Sa brillante pléiade de fées était un ivrogne, et un caprice passager de cet homme venait de décider de son sort.

2 commentaires:

Sylvie a dit…

tout ce que j'aime, tiens ça me fait penser à un magnifique livre que m'a prêté ma fille, il faut que je te donne le titre, un régal pour nos longue soirées d'hiver !
Cette année j'ai repris le chemin d"un SAL qui te tenait à coeur, mais façon de te dire combien j'aimais partager ta prose !

johala a dit…

Mon dieu, que j'ai aimé ce roman lorsque j'étais jeune, au point que ce livre m'a suivi toute ma vie!
Bises